Contact…. un petit bizzz résonne ….
Pression sur le démarreur… le moteur s’ébroue, fait des gargorythmes, puis le son des pots envoûtants se fait entendre, couvrant le bruit du moteur ….
...mais pas celui de l'embrayage, faisant un bruit mélangé de castagnettes, de casseroles et de claquements …
L’essence afflue dans les entrailles du 748 .. il s’échauffe la voix … le barouf de l’embrayage s’efface enfin,
passant le relais au bicylindre qui expulse maintenant dans un son sourd et rauque un souffle chaud de gaz brûlés.
D’un mouvement vif la moto est redressée, puis c’est la béquille qui est rentrée…
La première, verrouillée dans un claquement sec, laisse maintenant tout son champ d’action à l’expression
du moteur italien qui ne demande plus à présent qu’à cracher ses chevaux dans un vacarme assourdissant…
Visière baissée et vitesse embrayée, je m'éloigne soudain dans un nuage de poussière pour vous rejoindre au point de rendez vous fixé par nous…
Une chicane se profile au loin, je me prépare à rentrer une vitesse, ce que le sélecteur fait sans broncher....
Le compte tour fouette le cadran, le moteur hurle, les pots glouglouttent de bonheur en laissant échapper leurs vocalises….
Je visse à mort en sortie, non sans avoir pris soin de boulocher les pneus pendant ce passage délicat.
La moto se cabre, difficile à contenir, je m'efforce d'encaisser l'accélération soudaine
quand le rupteur me délivre enfin, tout en m'annonçant la reprise du déferlement de puissance…
Mes oreilles bourdonnent, je n'entends plus le souffle du vent, le niveau sonore est indéfinissable tellement
mes tympans hurlent leur douleur, mais le plaisir est ailleurs..
J'enquille la 4ème lorsqu'un flash me pique la rétine… un homme au milieu de la chaussée me somme de m'arrêter......
.... ce que je refuse d'un geste vif blessant l'amour propre de cet individu.
La cavale commence, deux bmw bleues se mettent au loin à mes trousses, je décide de les attendre un peu pour ensuite mieux les humilier..
Ma vitesse de pointe étant allégrement supérieure à celle de ces deux roues militaires, je décide d'emmener en balade notre petit convoi
vers des routes mettant plus en reflet les capacités propres des pilotes …
C'est alors qu'étant revenues à une distance respectable de moi les deux motos bleues sont poussées à pleine puissance
par les représentants de la loi qui essaient, en dernier recours, de tenter l'impossible ... me doubler!!!
Je décide de tester leur pilotage sur cette route étroite et sinueuse qui monte sur les hauteurs de nos forets Ardennaises,
en leur proposant un concours de déhanchements et de frottage de sliders..
Leurs malheureuses bottes de cuir s'effilochent rapidement sous l'effet de frottement du revêtement routier!!! ….
….quand aux miennes, bien rodées par mon passé de pilote confirmé, elles encaissent sans broncher la friction du macadam…
Le 748 est mené à ses limites, les plastiques des sacoches des bmw ne sont déjà plus qu'un lointain souvenir
car leurs pilotes, la rage et la bave aux lèvres, assoiffés d'un désir de me voir me coucher, prennent tous les risques possibles !!!
J'enchaîne les virolos à haute vitesse, les sculptures de mes pneus neufs changés dans l'après midi ne sont déjà
plus de ce monde : le pneu arrière est luisant comme un réservoir chromé de Harley Davidson… quand à celui de devant
des bouloches sont même projetées jusque sur les flancs de carénage …
Les bmw sont larguées, et maintenant se profile en bout de clairière une ligne droite, distance dont je vais me
faire le plaisir de parcourir la totalité à pleine vitesse et la roue avant décollée du sol!!! sous le regard ébahi des caisseux venant en sens inverse…
Ca y est !!! le bicylindre ancestral de l'usine italienne de Bologne est enfin délivré et va pouvoir de nouveau
faire cracher son essence brulée dans un son diabolique…
La roue avant surfe le sol pour enfin décoller sous l'impulsion d'un coup de poignet décidé ...
Les habitants sortent sur leurs trottoirs, croyant à une quelconque catastrophe naturelle ou à un crash d'avion tellement les gaz explosent
au contact de l'air ambiant dans un concert de décibels digne des plus grands maestros…
Le 748 est maintenant à sa vitesse maximale , l'aiguille du compte tours flirte sur le repère des 10800 tours,
je suis plaqué contre le réservoir, l'air catapulté de la bulle sur mon casque me donne l'impression d'être la capsule Apollo en rentrée dans l'atmosphère….
Je coupe les gaz.... plus de souvenir des gendarmes.....
La moto se tasse sur son pneu avant, me projetant vers l'avant inexorablement …
Mes bras encaissent la poussée …
Je rétrograde, le twin hurle en vibrant de toutes ses vis …
La roue arrière dribble, car le pneu arrière, usé par les trajectoires courbées, n'accroche plus grand chose et jette tous ses derniers atomes de caoutchouc sur la route…..
Soudain mes yeux perçoivent au loin une forme non distincte, que ma vue affaiblie par l'effort peine à discerner .
Je repart de plus belle, persuadé que cette forme ne m'est pas étrangère….
Effectivement elle ne l'est pas....
Car pointant son arrière en ma direction tel un sabre me provoquant en duel, ce bon vieux mille R1 me demanderait il de l'affronter????
Je dépasse son pilote, non sans lui adresser mes salutations respectueuses,
en lui balançant toute l'Italie en pleine visière.
Celui-ci, admirant mon pneu arrière digne des plus grands gommards de compétition, sera-t il assez fou pour tenter l'explication???
Driiiing driing !!! j’ouvre un œil… mais diable que les nuits sont courtes

!!!

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25/08/ 2004
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